18/07/2024
Je me lance de nouveau et à nouveau dans ces curieux voyages qui me sont propres, d'un jour, trois maximum, sortes de travels comme disent les Anglais pointant par ce mot le fait que ces déplacements relèvent du travail, puisque, effectivement, c'est dans mon cas pour un travail heureux sur soi.
Ces escapades ont lieu « de nouveau » puisque c'était antérieurement, par le déménagement en résidence senior suspendue, depuis plusieurs années ma pratique, qui maintenant reprend. Ces escapades sont « à nouveau » parce que le fracas de la voiture change tout. Je n'utilise plus que les transports en commun. Il y a moins de solitude. Pas forcément moins de concentration. Le train me donne un accès tout différent aux mêmes endroits, en raison de la durée du déplacement et de ses modalités. La voie ferroviaire opère des percées dans le paysage qui, de ce fait, m'impressionne plus. Elle me fait entrer dans les villes selon un angle de vue que je n'avais pas et il me faut m'orienter selon des points de repère neufs. J'ai le sentiment d'être plus immergée. Je redécouvre, donc. Je fais du neuf avec du vieux.
Je vais essentiellement pour ces voyages courts et pourtant de grande ampleur en Allemagne, que le protestantisme a façonné d'une manière heureuse pour moi.
J'ai déambulé avec autant de joie dans le vieux Frankfort avec tous ses recoins enlierrés et fleuris que dans le Frankfort de verre en surplomb sur les grands arbres des parcs presque en continu, surprise ici et là par les statues à taille humaine du mobilier urbain selon la tradition expressionniste revisitée tantôt humoristiques tantôt torturées, voire les deux à la fois. Je reviens de Fribourg en Brisgau, où j'ai rejoint avec bonheur, en la petite cathédrale, les rosaces de feu, le beau Dieu endormi, la chapelle au tabernacle en émaux du vingtième siècle. J'ambitionne dans les trois mois qui viennent les cryptes nues de Spire. J'estime en dépit de mon calvinisme avoir rendez-vous imminent avec la Vierge noire de Cologne. Il y aura aussi, certainement, altière, réservée et pourtant si accueillante, Freudenstadt en montagne... Et, presque toujours, le Rhin, le Rhin, le Rhin... Peut-être, tout d'élégance, les ports de Koblence et de Constance ?
Le train, souvent aléatoire, de tout fait une véritable expédition, donc plus que jamais une conquête, non extérieure mais intérieure, une conquête sur la paresse, sa paresse.