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01/01/2023

Je vis en ce temps de fêtes où les soins sont inaccessibles une expérience formatrice devenue à mes yeux bien étrange.

Je me réveille avec un sein douloureux qui bientôt gonfle plus que l’autre et plus tard rougit partiellement, de façon assez importante. Pas de consultation ni en gynécologie ni en radiologie possible, pas même de contact téléphonique, avant cinq jours, ce qui ne veut pas dire qu’alors je pourrai être examinée par un médecin.

Je flippe, me reprends parce que je ne veux pas devenir la marionnette de mes angoisses.

Un rêve vient me visiter, superbe, disant un bien-être personnel impensé jusqu’ici en mon corps de femme dans ma relation à moi-même. C’est beau non seulement par ce qui est dit, voire annoncé, mais en raison de l’esthétique des images, d’un point de vue cinématographique en quelque sorte. Au réveil, je me dis que ce rêve doit avoir été suscité par mon problème sénologique et que, dans ce cas, le problème sénologique n’est aucunement à regretter, quoi qu’il advienne par la suite. Un tel rêve, quel Evangile !

Que je le veuille ou non, mon esprit envisage toutes les hypothèses, du trouble hormonal passager au cancer du sein fulgurant. Je tâche de rester calme. C’est combat.

Je me vois en chimiothérapie, chauve et sans sourcils, épuisée et très maigre. Et alors ? J’inventerai, avec le monde soignant et les esthéticiennes en hôpital, une beauté sidérante, celle dont il m’a été donné d’être récemment témoin, qui nous aidera tous : moi-même, ceux qui seront amenés à m’approcher.

C’est étrange : je me sens basculer dans un autre monde, en restant dans celui-ci, dans le mien. On dirait que la porte scellée devant laquelle je me tiens depuis l’adolescence s’est ouverte. Liberté, paix, vivre tonique, du très doux, et tout ceci en pleine conscience. Que je vive, ce sera bon; que je meure, ce sera bien. Pour le mourir, je serai aidée de tous, un ange souriant à chaque porte franchie jour après jour. Je veux le vivre en beauté par la beauté, m’inclinant devant le réel.

Oui, c’est fou, mais en ces jours de tourmente c’est ainsi, je me sens ainsi. Et je n’ai aucune envie de retourner à temps et à mon monde antérieur dans lesquels il s’agissait de vivre en se cramponnant à la vie, pourtant pas forcément aimée.

Je me surprends au long de mes journées, à chaque fois que je suis devant un choix, à me demander doucement : « Si tu étais en soins palliatifs, que choisirais – tu ? » A chaque fois, ce que je m’autorise alors, est finalement très raisonnable !!! 

C’est bien ainsi que j’ai à vivre, que je sois en bonne santé ou non. Je vais déployer ceci : observer mes choix, à partir d’eux me construire pour le quotidien des priorités un peu autres, puis mettre en pratique.

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