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Dans des rencontres de pasteurs d’aujourd’hui, j’ai, comme une enfant, écouté la tradition orale, une tradition luthérienne, qui rapportait les propos de pasteurs d’autrefois, du début et du milieu du siècle dernier. Autoritaires, voire péremptoires, et bons, ils étaient hauts en couleur comme des  rabbis et les rabbins hassidiques. Il faut entendre leurs sentences avec l’accent, un accent à couper au couteau. 

L’un d’eux disait : « Quand les cloches sonnent, je m’habille toujours et je vais là où ça sonne ! » Il le faisait effectivement. Quel que fût l’office, catholique ou protestant, il était donc là, y compris aux funérailles de gens qu’il ne connaissait pas, solidaire pour avoir répondu à un appel lancé à tous vents. Belle façon de vivre le temps, faisant sens, pour moi aujourd’hui à la retraite…. Pourquoi pas ? 

Un autre, ayant écouté une femme triste qui lui disait, de son mari malade, que « la Faculté » – sous entendu de Médecine – l’avait « condamné » (″estimé incurable″), déclara, abrupt : « Dieu a encore son mot à dire là-dedans ! »

Un autre encore, détenu, apostrophé par un gardien qui lui demandait ce qu’il faisait près des fils électriques en limite du camp de concentration, répondit : «  J’essaie de lancer des idées positives dans le monde. » Et si ma prière devenait ceci ? 

Enfin, il y a cette parole, qui me parle tant aujourd’hui, en ce temps où je puis voir avec du recul ma propre existence. Le pasteur parlait d’une femme jeune dont la vie semblait fort mal engagée, cassée par un destin contraire dès les premières années. Il dit : « Dieu a pour elle autre chose ». Je souscris en ce qui me concerne. Je puis tranquillement dire que Dieu, pour moi, a eu autre chose, autre chose de très beau aussi. J’ai reçu un bonheur tout différent du bonheur des autres, un bonheur que je ne voulais pas, un bonheur dont personne n’aurait voulu ni ne voudrait, mais un bonheur quand même, voire un bonheur magnifique - ce qui signifie ″beau en grand″ -, privilégié. 

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